mercredi 10 décembre 2008

Influence de la télé ou des blogs? le pouvoir correctif du web

Intéressant débat au Social media club la semaine dernière sur le pouvoir des blogueurs, en marge d'une discussion sur l'évolution des relations publiques.

A ma gauche, "les blogueurs ont maintenant une réelle influence sur l'opinion, notamment dans le secteur de la high-tech, par rapport à la presse spécialisée traditionnelle". Ce qui est vrai.

A ma droite, des analystes plus circonspects: "Sur les sujets hors-geek, les journalistes fixent encore l'agenda, parlent à des millions de personne, ont un impact énorme sur le grand public, contrairement aux blogueurs". Ce qui n'est pas faux non plus, et pour bien des années.

L'un des aspects les plus intéressants de cette année, concernant la télévision, fut la confirmation de la puissance de la blogosphère pour corriger/critiquer la presse audiovisuelle.

Là où les journalistes de presse écrite ont commencé à comprendre la notion de commentaires, de critiques, d'horizontalité du web, les journalistes de télévision découvrent à leurs dépens qu'une voie de retour existe.

Avant, tout était simple. Si je faisais une erreur, une approximation, ou prenais partie (ce qui n'est pas forcément condamnable), dans mon reportage télé, j'avais droit à quelques coups de fils au standard, des lettres acides.

En cas de gros bidonnage, des articles dans la presse écrite (il y eut aussi à la télévision la période Arrêt sur images, qui vit de très belles heures sur le net).

Aujourd'hui, la critique est plus rapide, plus répandue, plus systématique.

Les (plus ou moins) grosses erreurs échappant à l'oeil des journalistes se voient pointer du doigt par des blogueurs/internautes/communautés de spécialistes. Des erreurs soulevées, corrigées, puis commentées, relayées, sur différents blogs ou sites...avant d'être reprises par les médias traditionnels en fin de parcours.

Quelques exemples cette année d'erreurs involontaires ou de bidonnages manifestes:

- La fausse photo de la tornade à Hautmont, "prise par un particulier", présentée comme un scoop à l'antenne par une présentatrice - un cliché qui datait de l'année dernière, et qui avait été réalisé au Royaume-Uni. La supercherie a été repérée par des internautes avisés (d'où la nécessité de vérifier les images amateurs).

- Le faux-client, vrai agent immobilier de ce sujet du 13 heures
: l'histoire n'a pas tardé à faire le tour de la toile.

Au rayon remontage, approximation, "survente" de sujet et dramatisation, trois exemples parmi d'autres.

- Une association qui s'indigne du montage final d'un débat de société sur le logement après avoir assisté à l'enregistrement de l'émission.

- Les étranges raccourcis des Infiltrés concernant une partie du tournage auquel j'ai pu assister.

- On retiendra surtout en 2008 ce reportage d'Envoyé Spécial concernant Facebook, accusé par la blogosphère d'avoir présenté le réseau social comme un repaire de drogués, ados neuneus, etc.

Un sujet magazine qui a déclenché un beau tollé - le meilleur résumé se trouvant évidemment sur BienBienBien.

Le plus surprenant...fut sans doute la surprise du journaliste, dans cette interview de l'Express.fr

Résumer une situation à gros trait, dramatiser (légèrement ou lourdement), couper/déformer un peu trop les interviews dans le sens souhaité (par le journaliste) : nous connaissions ces petits travers de la télé.

Ce qui est nouveau, c'est la possiblité non seulement de s'indigner (pour les spécialistes de la question), mais aussi de le faire savoir. Habitué à tenir son micro branché sur des enceintes surpuissantes, voilà le journaliste projeté dans l'arène, devant répondre point par point à une armée de téléspectateurs mécontents (pour des raisons valables ou non).

Face à ce nouveau pouvoir correctif de la blogosphère (du web en général), le journaliste télé paraît bien désemparé.

Il lui faudra d'abord descendre de son piédestal et se justifier, parler, répondre aux critiques - comme ses confrères ont pu l'expérimenter en ouvrant leurs articles aux commentaires ou en tenant leur blog.

Il lui faudra aussi évoluer sur ses présupposés (je suis le sachant, personne n'a accès aux sources, le public découvre mon sujet pour la première fois, il n'aura pas les moyens de vérifier ni de communiquer autour de mon reportage).

Il lui faudra repenser le fond - le choix de sujets ultra-consensuels - comme la forme - finie (un résumé en forme d'impasse à une seule entrée, sans possibilité de creuser, d'aller voir plus loin), un format de de plus en plus ringard aux yeux du jeune public, un tournage qui hésite toujours entre le storyboard du cinéma et la prise direct, enfin le montage.

MAJ 12/12/08: Comme le suggère François Guillot sur aaaliens, il faut rajouter à ce "pouvoir" de correction de la blogosphère celui des moteurs de recherche. Si l'on s'intéresse au sujet, on trouvera rapidement des billets apportant la contradiction, corrigeant/critiquant le reportage télé. Et pour longtemps. Grâce à la magie de Google. C'est l'une des forces du web (la permanence) par rapport au caractère éphémère et unique de la la diffusion. Mais là encore, on parle à l'heure actuelle de milliers (dizaines, centaines de milliers dans le meilleur des cas) quand une émission de magazines compte en millions de téléspectateurs.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Approximation typique d'un (ex) journaliste de télé : je n'étais pas à ta droite mais à ta gauche.

Aurélien Viers a dit…

hi hi, je vois qu'on manie le sens de l'image à I&0(s)...

Anonyme a dit…

chez i&e&o tu veux dire.

vu la MAJ, je suis on ne peut plus d'accord ;-)

anti a dit…

Voici un autre exemple ici :

http://annagaloreleblog.blogs-de-voyage.fr/archive/2009/05/14/chamans-gourous-nouveaux-sorciers-nouveaux-dangers.html

anti